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Actualités - janvier 22, 2011

Haïti : Jean Claude Duvalier « Baby doc» présente ses excuses au peuple haïtien

L’ancien dictateur Jean-Claude Duvalier a appelé vendredi à la «réconciliation nationale» sans donner de précisions sur ses intentions politiques. Les experts pensent que son retour a pour unique objectif la récupération de fonds bloqués en Suisse.

« Baby doc» est sorti de son silence. Pour la première fois depuis son retour surprise lundi en Haïti après 25 années d’exil, l’ancien dictateur Jean-Claude Duvalier s’est exprimé publiquement. En commençant, de manière inattendue, par faire amende honorable. Il a ainsi fait part vendredi, dans une brève déclaration prononcée d’une voix faible en français et en créole, de sa «profonde tristesse» pour ceux qui disent avoir été «à juste titre (…) victimes de (son) gouvernement». Le fils de «Papy Doc», qui est apparu très faible, ferait en effet l’objet d’une enquête dans son pays pour crimes contre l’humanité commis sous sa dictature (1971-86) selon Amnesty International.

L’ancien homme fort de Port-au-Prince a d’autre part appelé à «la réconciliation nationale», alors que le pays est toujours plongé au plus profond d’une crise politique qui ne cesse de s’accentuer. «Me voici pour témoigner ma solidarité en cette période difficile», a-t-il ajouté, un an après le séisme qui a dévasté le pays. S’il espère un «dénouement rapide de la crise politique», près de deux mois après une élection présidentielle toujours contestée et dont les résulats définitifs ne sont toujours pas connus, il n’a toutefois donné aucune indication sur ses intentions ou sur un éventuel retour sur la scène politique. Lors de ce premier discours, l’homme s’est dit «favorablement impressionné par l’accueil» qui lui a «été réservé pour cette visite, surtout par cette foule de jeunes» qui n’a pas connu sa présidence. Après cette allocution poussive d’une dizaine de minutes pendant laquelle il a semblé avoir du mal à s’exprimer, il n’a répondu à aucune question, laissant la parole à ses avocats.

Un retour motivé par l’appât du gain ?

Pour le moment, seul un ex-député républicain américain, Bob Barr, a soutenu l’ancien dictateur en saluant «l’amour qu’il ressent pour son pays» et «la compassion pour tous les Haïtiens» qui lui auraient fait braver «les risques encourus pas ce retour». Pas sûr que les intentions de «Baby doc» soient aussi vertueuses que ne le pense Bob Barr. Associations de défense des droits de l’homme et experts estiment que ce retour inopiné fait partie d’une manoeuvre qui lui permettrait de retrouver ses avoirs bloqués en Suisse. En grandes difficultés financières, il ne serait revenu en Haïti que par simple appât du gain. «Ca semble être l’explication la plus plausible lorsqu’on rassemble toutes les pièces du puzzle», estime Reed Brody, conseiller auprès de l’association Human Rights Watch et ancien procureur en Haïti.

Duvalier craindraint une loi suisse devant en vigueur le 1er février et qui permettra la restitution à Haïti de quelque 5,7 millions de dollars déposés par sa famille sur des comptes en Suisse. Le nouveau texte permettrait en effet au gouvernement helvétique de rendre directement à son peuple les fonds illicites bloqués même si Haïti n’avait pas engagé d’action en justice contre lui. Mais il aurait alors fallu que l’absence de poursuites soit motivé par un système judiciaire trop faible ou par son absence dans le pays. «Si Duvalier revient en Haïti et n’est pas poursuivi, alors il peut dire: je suis disponible pour des poursuites, mais vous ne me poursuivez pas, donc rendez-moi mon argent», explique Reed Brody.

Et la manoeuvre pourrait fonctionner. Si l’ancien dictateur a été inculpé mardi de corruption, de détournements de fonds publics et d’association de malfaiteurs, commis sous sa présidence et s’est vu signifier une interdiction de quitter le pays, il est ressorti libre du tribunal. «La Cour de cassation a depuis longtemps annulé ces plaintes, et en Haïti, la prescription couvre celles qui ont été déposées pour crime contre l’humanité», explique au site Marianne2 Camille Leblanc, ancien ministre de la justice haïtienne, avant de conclure : « Bref, il profite du système judiciaire que lui et son père ont mis en place.»

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