Aménagement du territoire : cadre législatif et institutionnel
Passer du mythe à la réalité
Si Haïti ne s’est pas encore doté d’une politique d’Aménagement du territoire, il importe toutefois de souligner que des initiatives internes ont été essayées depuis des décennies. Et dans le cadre de ses relations avec les Nations Unies, le pays a approuvé certains documents comme les Objectifs du Millénaire pour le Développement, les rapports relatifs à la Conférence Internationale sur la Population et le Développement(CIPD). C’est ce qui ressort d’un atelier organisé par l’UNFPA, le Fonds des Nations Unies pour la Population, le 28 octobre 2010.
A coté de ces documents, le pays s’est donné depuis 1987 une constitution qui fait de la question de l’Aménagement du territoire l’une des prérogatives des pouvoirs publics, prérogative corrélée au développement et à la décentralisation. Pour justifier cette assertion, la chargée de Programme‘’ Population et Développement’’ à l’UNFPA a mis en lumière les articles que voici :
L’Article 81 stipulant que : ‘’Le Conseil départemental élabore, en collaboration avec l’administration centrale, le plan de développement du département’’.
L’article 82.1 proposant que : ‘’Le Conseil interdépartemental, en collaboration avec l’Exécutif, étudie et planifie les projets de décentralisation et de développement du pays, sur les plans social, économique, commercial, agricole et industriel’’.
L’adoption de la constitution de 1987 fait partie d’un cadre légal qui commençait à se constituer probablement dès 1962 avec l’adoption du code rural de François Duvalier. Le tableau ci-après, peut bien en témoigner de la constitution au fil des ans de ce corpus légal se rapportant à l’Aménagement du territoire.
ANNEE |
LOI / DECRET / ARRETE / DOCUMENTS DIVERS |
1962 |
Code Rural Loi sur les établissements humains |
1968 |
Lois sur les parcs nationaux et les sites naturels |
1963 |
Loi sur l’Aménagement des villes et des campagnes |
1978 |
Loi modifiant celle du 19 aout 1976 sur la Délimitation territoriale |
1982 |
Loi du 6 janvier fixant les règles spécifiques relatives à l’habitation et à l’Aménagement de nos cités et Agglomérations Rurales et Urbaines Loi du 19 septembre relative à l’adoption d’une politique cohérente d’aménagement du territoire et de développement Décret loi sur le lotissement Décret du 22 octobre sur les Communes |
1983 |
Loi sur la communauté urbaine de Port-au-Prince |
1986 |
Loi portant organisation de la Collectivité Territoriale de Section Communale |
1987 |
Constitution de la République d’Haïti |
1989 |
Décret définissant l’organisation du MPCE, Loi du 10 mars réorganisant le MPCE |
Sept (7) années après l’adoption du Code rural (François Duvalier) et la Loi sur les établissements humains, les autorités haïtiennes allaient créer le Conseil national pour le développement et la planification (CONADEP) dont l’une des divisions était dédiée à l’Aménagement du territoire. D’autres instances allaient voir le jour.
En janvier 2009, rapporte Muriel Antoine, Michèle Duvivier Pierre-Louis, la Cheffe du Gouvernement d’alors, avait pris un arrêté portant la création du Comité interministériel d’aménagement du territoire (CIAT), organe chargé de définir la politique du gouvernement en matière d’Aménagement du territoire, de Protection des bassins-versants, de Gestion de l’eau, de l’Assainissement, de l’Urbanisme et de l’Equipement(Article 2 dudit arrêté).
Les alinéas 2, 3, de l’article 4 de l’arrêté en question clarifie les attributions du CIAT :
-
Assurer la révision du cadre légal, réglementaire et institutionnel de l’aménagement du territoire.
-
Garantir une répartition des ressources humaines, techniques et financières qui permet la mise en œuvre de la politique d’aménagement du territoire et prend en compte le développement des collectivités territoriales.
Mais le travail que l’on attend du CIAT n’est pas garanti d’avance, vu que la collaboration avec les autres organismes œuvrant dans le secteur ne s’annonce pas sans difficultés. Ces derniers ont émis et gardé certaines réserves sur ce comité. Pour cause la chargée de Programme à l’UNFPA pense que le CIAT devrait ‘’ réguler et non décider unilatéralement’’.
Mme Antoine a également analysé le Document Stratégique National pour la Croissance et la Réduction de la Pauvreté (DSNCRP). L’Aménagement du territoire – faisant partie du pilier 3 (Gouvernance démocratique) – est promu comme ‘’la réponse intelligente au problème de la croissance économique et de sécurité de la société. Dans ce contexte, la décentralisation politique et économique devra se conjuguer afin que l’aménagement du territoire assure une bonne répartition spatiale des activités et garantisse une politique cohérente de rénovation rurale. De manière spécifique, il s’agira de reconstruire à terme le territoire national sur la base de l’intégration de l’espace national, de la solidarité entre les zones rurales et urbaines et de la compétitivité des divers territoires’’.
Elle a terminé sa communication avec certaines propositions que les décideurs pourraient explorer dans l’application d’une politique d’Aménagement du territoire. Elle a suggéré :
-
Le développement d’autres pôles de croissance pour pouvoir décongestionner l’Aire Métropolitaine de Port-au-Prince
-
L’établissement de mesures incitatives aptes à faciliter le retour des populations vers les zones rurales d’origine
-
L’aménagement des zones urbaines
-
La création d’infrastructures de base pour propulser l’investissement.
Ainsi, l’on pourra passer du mythe à la réalité en matière d’Aménagement du territoire en Haïti.