ÉDITORIAL : Magistral cours inaugural !
Hier, le peuple sénégalais a accueilli dans la dignité et l’honneur des enfants d’Haïti, avec à sa tête le président de la République, Me Abdoulaye Wade, entouré des membres de l’Assemblée nationale, du Sénat, du Gouvernement, du Corps diplomatique, d’éminentes personnalités et de nombreux invités. A travers un discours de très haute facture, Me Wade a reçu ses hôtes du jour, étudiants et étudiantes haïtiens, les invitant à s’abreuver au puits du savoir, au pays de Kocc Barma, celui de la Téranga.
Dans son adresse, il a encore magnifié la solidarité africaine, une solidarité agissante par l’exemple, loin des discours creux, comme il a eu à le démontrer dans d’autres circonstances, par exemple lors d’un autre élan de solidarité qu’il avait manifesté, il y a quelques années, après qu’un cataclysme naturel a frappé le peuple algérien.
Cette solidarité agissante, que le Sénégal et ses enfants ont manifestée, hier, au peuple haïtien à travers ces 163 étudiants et étudiantes, est le signe évident et manifeste que nous constituons une nation de cœur et de générosité, qualités portées très haut par son premier Magistrat. Intellectuel désintéressé et fier de son continent, confiant en ses fils qu’ils sauront relever les défis du développement, Me Wade vient encore une fois de démontrer que, comme l’enseignent les Livres saints, la Thora, la Bible et le Coran, la seule quête de l’Homme doit être la sollicitude envers son prochain.
Dans les universités et écoles qui vont les accueillir, les jeunes haïtiens cohabiteront dans la fraternité avec d’autres Sénégalais et Africains qui ont pris la ferme résolution d’aller à la source du Savoir où il ne peut exister aucune discrimination si l’on a la foi devant la connaissance que tous les hommes sont égaux. Petit pays sahélien sans grandes richesses naturelles particulières, le Sénégal a démontré, hier, à la face du monde, que la seule vraie richesse est le partage sincère et profond, l’amour et la générosité non feints envers son semblable. Lors de cette arrivée à Dakar, aux pieds du majestueux Monument de la Renaissance, les étudiants haïtiens ont suivi leur premier cours inaugural avec, à la chaire, un professeur de talent en la personne du président de la République.
Le discours de Me Abdoulaye Wade a été un cours magistral, le premier que ces jeunes haïtiens ont suivi avec intérêt avant d’intégrer dans quelques jours les différentes facultés qui vont les accueillir. Le décor rappelait ces grands temples de la Rome antique, lieux de savoir, de science et de sagesse. Dans les pensées de ces jeunes se bousculaient certainement les images de leur pays ravagé par un violent séisme, le 12 janvier dernier, la séparation avec leur famille et leurs proches certainement empreinte d’émotion et inondée de pleurs, le rêve de revenir pour participer à la construction d’un pays qui les a vu naître et grandir. Me Wade, le professeur du jour, le professeur qu’il est resté, a aussi assurément touché une fibre sensible lorsqu’il a évoqué la Renaissance africaine.
Ces étudiants, porteurs des aspirations de développement de la lointaine, mais si proche Haïti, ont suivi, avec toute l’attention qui sied devant un sage, le discours empreint d’espoir que leur hôte leur a servi : un message optimiste, rempli de dignité. Ils se sont subitement retrouvés à Dakar, sur la terre de leurs ancêtres, par un hasard que les caprices de la nature ont dicté, sans y avoir peut-être jamais pensé. Un rêve vécu par ces fils d’Haïti, loin de la capitale, Port-au-Prince. Petits-fils d’esclaves de Saint-Domingue dont le violent soulèvement fut à l’origine de la naissance d’Haïti, laquelle devint, en 1804, la première République indépendante composée d’une population essentiellement noire, ils ont de qui tenir par la lignée, le courage et l’abnégation. Me Wade a su toucher une corde sensible en évoquant largement la Renaissance africaine, ciment d’un continent en devenir dans un monde turbulent dont la marche effrénée est dictée par l’avoir et le pouvoir. Haïti et le Sénégal ont des destins communs, pays pauvres, certes, mais où la dignité et l’honneur ont pétri les cœurs, partageant la même langue officielle héritée de la colonisation, séparés par l’Océan Atlantique, mais unis par la solidarité et un amour viscéral de la liberté, de la vérité et de l’honneur.
Ce soir du 13 octobre, date que l’Histoire et l’amitié entre les deux peuples retiendra à jamais, Me Wade a fait vibrer cette fibre profonde qui tisse la noblesse des actes et des propos de deux peuples liés par leur négritude et leur soif de bien-être. L’Histoire retiendra que l’élan de solidarité et de générosité dont Me Wade a fait montre, son peuple partageant cette passion de l’autre, est un acte de foi en l’Homme.
Par Cheikh THIAM
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