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Actualités - juin 28, 2011

Haïti/Littérature : La République Bossale / Alexis et les carnassiers du pouvoir

Lisez ces quelques extraits de ce livre d’Edgard Gousse pour comprendre…

Le propre du bossalisme est d’engendrer un cercle vicieux donnant libre cours aux querelles intestines et aux ambitions particulières des individus et des groupes. Il entraîne, en ce nous concerne comme vieux peuple que nous sommes, l’annihilation de la conscience des vrais enjeux articulés autour de l’alternative : équilibre ou néantisation. En pareil cas, ce pays qu’est le nôtre, « La République bossale » — celui, dans le futur, des arrière-petits-fils de nos arrière-arrière-petites-filles, qui sait ! — sera dirigé au cours du prochain millénaire par une société de primates sur-civilisés qui le feront sans doute mieux.

L’Homo haitianus (l’homme-haïtien) contemporain aurait-il atteint ce stade où il ne peut plus exister dans la collaboration ? L’instinct de survie l’aurait-il effectivement ramené à l’état de nature « auquel l’homme a été arraché par la civilisation » ? Qui sommes-nous finalement, pour sortir du clientélisme démagogique et vouloir coûte que coûte aboutir au bossalisme ? Les agissements délictueux de ceux qui détiennent le pouvoir normatif dans cette « République bossale » ne sont-ils pas suffisamment symptomatiques d’un manque de dignité, caractéristique de la classe dirigeante dans toutes les sphères de la société ? Ne révèlent-ils pas une certaine incapacité à s’autocontrôler, à identifier le Bien à l’intérêt national ? (page 418)

« Tout se passe comme si ce peuple qui a fait l’indépendance, qui a lutté et rem-porté la belle vic-toire décisive contre l’armée napoléonienne de France était tom-bé sous le charme de l’impossible. Les dirigeants haïtiens semblent incapables de ré-gler leur marche sur celle de l’histoire, de faire, à moyenne ou à longue échéance, cause commune avec la majorité et de soutenir le progrès. »

(page 435)

BOSSALISME

Le terme bossalisme s’emploie pour désigner une certaine tendance ou orientation générale d’un groupe d’individus, celle qui consiste à subordonner ou à ramener toute réalité à leurs préférences ou désirs personnels. Le bien, le juste, la vérité se confondent alors avec les desiderata individuels. C’est l’échec de la conception affirmant l’existence sui generis de la société et de l’État, élevant les valeurs qui y sont associées (le primat de l’intérêt général, le respect des bonnes moeurs, la réciprocité, l’obéissance civile, l’humanisme, le civisme) au rang de finalité. Dans cet ordre d’idées, Durkheim soutient avec raison que la « subordination des intérêts particuliers à l’intérêt général est la source même de toute activité morale ». 18

Le bossalisme produit donc un sujet qui ne connaît aucune limite à son ambition et qui n’hésite jamais sur le choix des moyens pour la satisfaire. Dénaturé ou perverti, le bossale est privé de toute conscience humaine et citoyenne, ce qui exclut alors l’amour de ses semblables et de la République. La dénaturation ou la perversion le prédispose au cynisme et à l’arbitraire face à ses semblables, mais aussi à l’indifférence hautaine par rapport aux conséquences de ses actes criminels (viols du bien public et privé) et immoraux (viols de la conscience collective, mensonges d’État, humiliations de ses

compatriotes). En d’autres termes, le bossale ne peut répondre que de lui-même, puisqu’il se place en dehors de la morale. L’irresponsabilité sociale et citoyenne est son trait principal.

18 DURKHEIM, Émile, De la division du travail social (1897), Paris, PUF, coll. Quadrige,

2e édition (Préface de la seconde édition), 1991, p. XVII. 

 

La République Bossale

Alexis et les carnassiers du pouvoir

Éditions du CIDIHCA, Montréal, juin 2011, 520 pages (2e édition, revue et actualisée) par Edgard Gousse

Présentation de l’auteur

Né à Jacmel (Haïti), professeur, chercheur et écrivain ayant d’abord vécu une vingtaine d’années à Montréal et séjourné à Cuba et dans plusieurs autres pays de l’Amérique latine (Argentine, Brésil, Chili, Mexique et Uruguay) où il a présenté des conférences, sur la littérature, dans plusieurs centres universitaires. Meilleur conférencier au «Congreso Internacional: La ciudad y el escriror» / Con-grès international : La ville et l’écrivain, réunissant 114 écrivains-conférenciers des Amériques et d’Europe (Monterrey, mai 1996), vice-président du «Congreso Internacional de Poesía» (Santiago de Cuba, juillet 1999), il a reçu en 1995 la Médaille José María Heredia (section littérature) décernée par l’Union des Écrivains et Artistes de Cuba (UNEAC). Plusieurs fois membre de jurys littéraires, dont le Grand Prix du Livre de la Ville de Montréal (1994, 1995 et 1996, catégories roman, essai et poé-sie), le Prix littéraire de la Ville de Laval (1995), le Prix de théâtre intégrateur (Montréal, 1998). Président de jury au «Concurso Nacional de Poesía Pedro Correa Vasquez» (Santiago de Cuba, juillet 2000), il a également traduit plusieurs auteurs latinoaméricains et participé à de nombreux programmes de radio et de télévision, dont Radio-Canada International et CBF-Radio-Canada (Montréal), La Voix de l’Amérique (Washington), Radio Habana (La Havane), Radio MAMBI (Santiago de Cuba) et TV-5 International. Il a publié romans, essai, théâtre, récit historique et poésie, à Montréal, à Paris, à La Havane et à Santiago de Cuba. Il a également été, à Montréal, de 1992 à 1998, éditeur et directeur de Ruptures [la revue des Trois Amériques], revue littéraire en plusieurs langues (français, anglais, espagnol et portugais), atteignant parfois les 600 pages et diffusée dans pas moins de 30 pays des Amériques et du reste du monde. Edgard Gousse était retourné définitivement en Haïti pour se consacrer à l’enseignement universitaire, à la recherche et à l’écriture. En tant qu’enseignant, Edgard Gousse a animé ou participé à de nombreux séminaires, congrès et colloques nationaux et internationaux (Québec, Canada, États-Unis, Argentine, Cuba, Mexique, Guatémala, Haïti, etc.). Il a par la suite été, en Haïti, consultant au Parlement de la République, directeur de cabinet et conseiller de ministre. Auteur du bouleversant roman Le fils du Président (Monde Global, Paris, 2009), il enseigne actuellement à Montréal, contraint de laisser son pays un mois après le séisme du 12 janvier 2010.

Quelques titres du même auteur (à partir de 1993)

Mémoires du vent, poèmes, Éditions du Noroît, Montréal, 1993.

La torre de las locas, poèmes, traduction de José María Riquelme et Salvador Torres Saso, Éditions Teichtner, Laval, 1996.

La sagesse de l’aube, poèmes, avec six dessins de Sergio Kokis, Triptyque, Montréal, 1997.

La sabiduría del alba, poèmes avec préface de Ángel Augier, édition bilingue, traduction de Roberto Jovel et Salvador Torres Saso. En coédition : Instituto Cubano del Libro, Editorial José Martí, Editorial Arte y Literatura, La Havane et Triptyque, Montréal, 1997.

La soledad de la piedra, poèmes, traduction de Roberto Jovel, Ediciones Catedral, Santiago de Cuba, 2000.

Les yeux de la chair, roman, Éditions Teichtner, Laval, 2004.

Dans le ventre de la Bête, essai sur l’Occupation américaine d’Haïti, Éditions Teichtner, Laval, 2004.

Les oiseaux se taisent et me regardent, poèmes, avec neuf dessins de Sergio Kokis, Triptyque, Montréal, 2008.

Le fils du président, roman, Éditions Monde Global, Paris, 2009.

Zonbi goute sèl, poèmes en créole, Éditions du CIDIHCA, Montréal, février 2011.

La terre a tremblé en Haïti, drame, Éditions du CIDIHCA, Montréal, février 2011.

La République bossale, récit historique, Éditions du CIDIHCA, Montréal, juin 2011.

Poèmes et textes diffusés dans de nombreuses revues et publications collectives, dont les suivantes : Casa de las Américas (La Ha-vane), Sierra Maestra (Santiago de Cuba), Del Caribe (Santiago de Cuba), Compost (Boston), El Cocodrilo Poeta (Mexico), Exit (Montréal), Moebius (Montréal), Brèves littéraires (Laval), LittéRéalité (Toronto), Sapriphage (Paris), Huasi (Buenos Aires), Ánfo-ra Nova (Madrid).

 

À paraître très prochainement :

Ne dites pas à ma mère que je suis une salope, roman, Éditions du CIDIHCA, novembre 2011.

Ti won san fon, roman en créole, Éditions du CIDIHCA, novembre 2011.

Je ne danse qu’avec les femmes nues, poèmes, Éditions Triptyque, février 2012.

 

En préparation :

Les épouses de Dieu, roman.

Haïti doit disparaître, roman.

Elles de mémoire, poésie.

 

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